Dégradation de la situation en Tunisie (G2R Newsletter 01/2011).

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Les vagues de contestations économiques et sociales font tomber le régime de Ben Ali


Suite  aux  évènements  d’ampleur  qui  ont  frappé  la  Tunisie  depuis  fin  décembre  2010,  avec  notamment  de  violentes  contestations  du  régime  politique  en  place,  le  Président,  Zine  el-Abidine  Ben  Ali,  a  été  contraint  à  la  démission  et  à  l’exil  après  23  ans  d’exercice  du  pouvoir.  Le  Président  tunisien  par  intérim,  Foued  Mebazaa,  s'est  engagé,  le  19/01/2011,  à « une  rupture  totale  avec  le  passé ».  Aussi,  en  janvier  2011,  la  Tunisie  est  entrée  dans  une  phase  de transition politique dont le jeu reste entièrement ouvert.  

Les  agences  de  notation  financière  dégradant  la  note  de  la  Tunisie,  reflet  d’une  analyse  des  risques à court terme ?  

Le 18/01/2011, Moody's a dégradé la note de la Tunisie de Baa2 à Baa3, pour signifier une augmentation des risques  liés  à  l’incertitude  politique.  Ses  consœurs  Standard&Poors  et  Fitch  ont  prévenu  qu'elles  pourraient  bien  en  faire  autant. Pourtant, cette dégradation est sans conteste un reflet des évènements court-termistes. En effet, on ne peut  imaginer en Tunisie  un  scénario à la « grecque », dans  la mesure où le  pays  du Maghreb  ne souffre pas des mêmes  maux économiques que certains pays du sud de l’UE. Tout d’abord, la Tunisie n’a pas de problèmes de dette extérieure  (47%  du  PIB  en  2010),  ni  de  réserves  (10  milliards  USD)  qui  serviront  notamment  à  refinancer  ses  dettes  arrivant  à  échéance en 2011 (775 millions USD, en avril et en septembre prochain). Par ailleurs, la compétitivité du marché du  travail  et  la  spécialisation  du  pays  dans  la  sous-traitance  textile,  agro-alimentaire  et  mécanique  lui  ont  permis  de  traverser la crise relativement sereinement. Cela explique que sa croissance demeure tonique (6,3% en 2007, 4,5% en  2008, 3,1% en 2009 et 3,8% en 2010). D’ailleurs, la Tunisie est un pays de confiance pour les investisseurs, les quelques  3 milliards USD d'investissements étrangers le prouve (à noter que ce montant est équivalent à celui de l’Algérie, pays  pourtant  quatre  fois  plus  peuplé  et  doté  des  ressources  pétrolières  et  gazières).  Le  problème  structurel  tunisien  est  plutôt le chômage des jeunes, évalué à plus de 30% selon les sources officielles. Néanmoins, celui-ci est en partie dû à  l'étouffement économique qu'a provoqué la prédation des proches de l'ancien Président. En effet, la corruption qui les  a  enrichis  s'est  développée  grâce  à  l'installation  de  verrous  ou  de  "péages"  qu'ils  ont  installés  sur  les  institutions  économiques - douanes, urbanisme, infrastructures, autorisations administratives, etc. - qui ont handicapé l'activité.  
En  définitive,  à  court  terme,  Moody's  a  certainement  raison  de  dégrader  la  note  tunisienne  :  l'instabilité  politique  actuelle  représente  un  risque  réel  pour  les  investisseurs.  En  revanche,  à  moyen  et  long  terme,  l’abaissement  des  verrous politiques au développement économique, l’amélioration de la gouvernance avec la construction d’un régime  démocratique  ouvert  et  d’une  société  civile  émergente,  ainsi  que  les  perspectives  d’un  développement  social  plus  soutenu devrait  permettre aux agences de revoir leur note à la hausse. 

Par Léo G. 

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